Bonjour
J'ai fait une petite expérience il y a quelque temps, un jeu si on veut
, en tirant les 22 arcanes majeurs du Tarot successivement, en les disposant les uns à la suite des autres pour que ça raconte une histoire... et en essayant justement de la raconter, cette histoire...
Voici le résultat, j'ai pensé que ça pourrait vous intéresser
Et peut-être que d'autres voudront faire l'expérience aussi ? Ca serait chouette tout un fil d'histoires racontées par le Tarot...
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Je suis le Pendu
12 degrés après le début
j'ai 12 ans
ou 12 années-lumière
J'ai la tête en bas
Car la tête en haut
Me faisait mal.
Mes cheveux pendent vers la terre.
Je perds tout ce qu'il y avait dans mes poches
Je ne sais plus rien
J'oublie tout
Sauf ces branches qui m'entourent
Et la corde double qui me retient
Je suis au bord du suicide
Symbolique ou véritable
J'appelle à l'aide
Quelqu'un qui viendra
Me dire quel est le sens de ma vie
Un ange arrive alors
Pour répondre à l'appel
Il/Elle s'appelle Tempérance
Il-elle me dit
"Pourquoi te lamentes-tu ?
Ne sais-tu pas que Dieu
Est là pour tous ceux qui osent
Demander son aide ?"
Il-elle a pris les liquides
De mon corps
Crevé mes yeux, vidé mes artères
Et tout mis dans deux vases étranges
Puis les a mélangé longtemps
En murmurant des paroles
De paix et de bienveillance
Enfin elle m'a tout rendu
Et s'est transformée en livre
Ouvert
De couleur chair
Parcouru de lignes courbes
Et mystérieuses
Du livre est sorti un voix
"Papesse sans s
je viens pour te montrer
où il te faut chercher
ce que tu cherches
sans savoir où chercher.
Je suis la répétition et l'apprentissage
Une maîtresse dure et pure
Au visage insondable
Que tu ne connaîtra jamais complètement.
Je suis l'humilité qui accepte de ne pas savoir et de ne rien comprendre.
Lis le livre et trouves-y l'acceptation."
J'ai plongé mes yeux sur les lignes
Et entre elles
Je n'y ai vu d'abord
Qu'un magma informe
Rougeoyant, verdoyant
Flammèches tournantes qui se sont élevées
En spirale jusqu'à mon visage
J'ai eu peur d'être brûlé
Mais elles étaient étrangement fraîches
Et j'y ai plongé mes mains
Puis tout mon corps
Le livre s'est embrasé
Et du tas de cendres tombé à terre
A émergé la figure d'un empereur
Homme sage au pouvoir fort
Il m'a dit "je suis toi et tu es moi
Mais pour l'instant tu ne peux pas encore voir qu'il n'y a pas de séparation."
Je l'ai regardé, en face de moi,
Droit comme un I – stable comme une ancre marine
De son sceptre émanait une lueur bleutée irréelle
Qui m'a rendu rêveur.
J'ai eu la vision d'un chariot
Galopant sous la lune
Entre des hordes de chiens hurlant
Dans la nuit
J'ai vu sept hommes, sept empereurs
Sortir d'un bois et me disséquer en sept morceaux.
J'ai été détruit et reconstruit
Cette nuit, par sept empereurs sous le regard de chiens hurlant sous la lune.
Après ça je n'ai plus jamais été le même.
Quelques mois plus tard, j'ai rencontré une jeune femme.
Elle était blonde, au regard un peu fuyant.
Elle m'a ouvert un nouveau monde
Lorsque d'une main elle a pris ma verge
Et de l'autre les deux sœurs jumelles
Qui la nourrissent.
Je n'ai pas compris mais je l'ai laissé faire
Et j'ai été poursuivi de délices
Pendant plusieurs semaines à ses côtés.
Quand elle est partie
Je l'ai regardée s'éloigner en dansant
J'ai su qu'elle partait révéler
Ce nouveau monde à d'autres hommes que moi.
Je me suis retrouvé comme un jeune poète
Qui n'a que l'inspiration
Mais pas encore l'expérience.
Tâtonnant, cherchant la forme
De ma vie
J'ai visité plusieurs pays
Extérieurs ou intérieurs
Certains m'ont semblé beaux
D'autres m'ont effrayé
Surtout celui où, au hasard de mes promenades,
J'ai vu un jour dans une maison dont la porte était entrouverte,
Deux petits garçons attachés par une corde à un pilier,
Nus, fouettés à tour de rôle
Par un homme grimé comme le diable lui-même.
Je me suis enfui en courant
Et il m'a fallu des années
Pour me défaire de cette image.
Je suis resté bloqué,
Suspendu entre ciel et mer,
Un animal dans chaque main
Et ne sachant pas lequel tuer
Pour me libérer de ma vision infernale.
Lorsque enfin je me suis décidé
Ce fut pour les tuer tous les deux
L'un comme l'autre devenait encombrant
Et il n'était plus tant question de choisir
Que de m'alléger les bras
Une épée à la main,
Devenant pour un moment
La faucheuse persistance,
J'ai pourfendu ces êtres de nulle part.
Et c'est à partir de là
Que j'ai trouvé la Force – la vraie force
Qui maintenant soutient ma vie.
Elle m'a donné le sens de la justice,
Et parfois je me surprends,
Comme une femme sans âge
Assise sur un trône impersonnel,
Pesant le pour et le contre,
Une épée à la main
Prête à trancher.
Malgré tout j'ai traversé des crises
De doute.
Ces moments où l'on ne sait plus rien
Ni quoi faire ni quoi dire ni où aller.
Je me suis retrouvé comme au début
Perdu, pendu, et même sans le refuge
De la plainte et de l'isolement.
J'ai été vieux à ce moment-là.
Vieux à en pleurer et à me dessécher sur place
Malgré la lueur que j'essayais de maintenir à flot.
Je ne voyais plus rien
Mes pas tournaient en rond dans l'obscurité
Et je suis tombé dans un gouffre
Comme Alice au pays des merveilles
J'ai chuté longtemps
Dans le noir
Sans objet bizarre pour me tenir compagnie
Alice eut de la chance
De n'être pas seule
Dans sa dégringolade
Moi je fus seul
Du début à la fin
Jusqu'à ce que le sol, enfin,
M'arrête brutalement.
J'ai tâtonné autour de moi.
Murs de terre, sans fin, circulaires
Mais si, quand même,
Une porte.
Je l'ai secouée sans réfléchir
Et alors que je l'avançais pour sortir
Tout mon corps a basculé vers l'avant
Comme si un aimant dans la terre
Attirait un aimant de la polarité contraire
Situé dans mon cœur
Je suis sorti en marchant à quatre pattes et en luttant pour ne pas être englouti par cette attraction.
Et enfin lorsque tout mon corps a été dehors
Lorsque j'ai marché sur les mains aussi facilement que si mes pieds avaient été tirés vers le ciel par deux gros ballons flottants,
Mes pieds se sont transformés en mains,
Mon cul en tête,
Mes mains en pieds.
J'ai été tout inversé d'un seul coup d'un seul.
Changé en fou errant
Le décor a disparu,
Remplacé par une simple route
Et je suis parti un bâton dans chaque main
L'un pour le soutenir
Et l'autre pour me rappeler tout ce que j'avais
Vu et entendu jusque là
Au cas où je l'oublie.
Ainsi j'ai entamé la dernière ligne
De ma vie.
Fou errant.
Mat pour les oiseaux errants comme moi.
Que pouvais-je rêver de mieux ?
Je suis tombée amoureux
Mais ça n'a pas duré
J'ai trouvé ça superficiel
Je suis allé dans des pays chauds
Où le soleil brûle la peau
Arrogante qui ne s'est pas protégée.
Il a dû me cogner un brin sur la tête
Bien que j'avais mis un chapeau
Parce qu'aujourd'hui j'entends des anges
Me parler à coups de trompette.
C'est le jugement dernier – peut-être
Ou le premier, celui qui précède
Le véritable envol
Dans l'acceptation du sens insensé
Que prennent les courbes de la vie.
J'ai rêvé d'une impératrice au visage d'aigle
C'est peut-être ma muse
Ou mon ange gardien.
Je vais m'en remettre à elle
Pour qu'elle me guide sous les étoiles
Vers ma juste place.
Elle me donne deux vases
Et me montre une rivière
Alors que je plonge instinctivement
Les deux vases dans l'eau
Puis que je les ressors pour laisser l'eau
S'écouler,
Ils m'échappent des mains
Et deviennent deux garçonnets
Qui me regardent
Avec des yeux profonds et simples.
Ils ouvrent leurs mains vers moi
Et leurs yeux, farouches,
M'ordonnent de leur donner tout ce que j'ai.
Je me dépouille
Et dépose tout dans leurs mains.
***